Mon résumé
: Mattia et Alice,
touchés tous les deux par un drame dans leur petite enfance ont pour
point commun leur solitude et leur caractère singulier. Mattia a perdu
sa soeur jumelle après l'avoir abandonnée dans un parc
pour se rendre seul à l'anniversaire d'un de ses copains. Alice a eu
un grave accident de ski lorsqu'elle était toute jeune, lequel lui a
laissé des séquelles à une jambe. Ils font connaissance
au lycée et Mattia est persuadé qu'Alice est sa jumelle de coeur :
même passé douloureux, même solitude à la fois voulue et subie, même
difficulté à réduire la distance qui les isole des autres.
De l'adolescence à l'âge adulte, leurs existences ne cesseront de se
croiser, de s'effleurer et de s'éloigner dans l'effort d'effacer les
obstacles qui les séparent.
Mon avis : "Les
nombres premiers ne sont divisibles que par 1 et par eux-mêmes. Ils
occupent leur place dans la
série infinie des nombres naturels, écrasés comme les autres entre
deux semblables, mais à un pas de distance. Ce sont des nombres
soupçonneux et solitaires, raison pour laquelle Mattia les
trouvait merveilleux. Il lui arrivait de se dire qu’ils figuraient
dans cette séquence par erreur, qu’ils y avaient été piégés telles des
perles enfilées. Mais il songeait aussi que ces nombres
auraient peut être préféré être comme les autres, juste des nombres
quelconques, et qu’ils n’en étaient pas capables.[...] Mattia avait
appris que certains nombres premiers ont quelque chose de
particulier. Les mathématiques les appellent premiers jumeaux : ce
sont des couples de nombres premiers voisins, ou plutôt presque voisins,
car il y a toujours entre eux un nombre pair qui les
empêche de se trouver vraiment. Des nombres tels que le 11 et le 13,
tels que le 17 et le 19, le 41 et le 43. Si on a la patience de
continuer, on découvre que ces couples se raréfient
progressivement. On tombe sur des nombres premiers de plus en plus
isolés, égarés dans cet espace silencieux et rythmé, constitué de seuls
chiffres, et l’on a le pressentiment angoissant que les
couples rencontrés jusqu’alors n’étaient qu’un fait accidentel, que
leur véritable destin consiste à rester seuls. Mais au moment où l’on
s’apprête à baisser les bras, découragé, on déniche deux
autres jumeaux, serrés l’un contre l’autre. Mattia pensait qu’Alice
et lui étaient deux nombres premiers jumeaux, isolés et perdus, proches
mais pas assez pour se frôler vraiment." Voilà le
passage qui, a mon sens, explique le mieux le titre du livre et le
ressenti de Mattia quant à la singularité de son caractère et de celui
d'Alice.
L'histoire se déroule de 1983 à 2007 et nous raconte au fil du temps les existences de Mattia et d'Alice qui ne feront que de se croiser.
J'ai été touchée par ces deux jeunes plein de souffrances : Mattia
tente d'exorciser ses blessures par des automutilations. En effet,
c'est de sa faute s'il a perdu sa soeur
jumelle. Il n'avait qu'une rue à traverser pour se rendre à
l'anniversaire de son copain, mais pour avoir la paix, il a demandé à
Michela de rester à l'attendre dans le parc. Deux heure plus
tard, la petite fille n'y était plus. Son corps n'a jamais été
retrouvé. Alice, quant à elle a eu un grave accident de ski un jour ou le brouillard ne laissait aucune visibilité.
Ses deux drames vont laisser à ces enfants des cicatrices
indélébiles qu'ils vont devoir traîner toute leur vie telle une valise
trop lourde. Mattia ne cesse de s'automutiler et se réfugie dans
les mathématiques et Alice devenue boiteuse à vie se réconforte dans
l'anorexie. C'est ce qui va causer tout au long de leur vie l'isolement
et les railleries. Les émotions y sont décrites avec
intensité et le lecteur va suivre leur cheminement jusqu'à l'âge
adulte et les aléas de la vie qui font qu'ils vont alternativement se
perdre de vue puis se retrouver.
Tout au long du récit, j'ai eu envie de prendre Alice sous mon aile
car sa fragilité et son détachement vis à vis de son existence m'ont
émue. Par exemple, quand son mari
Fabio quitte le domicile conjugal, elle ne fait
rien pour le retenir, fait comme si de rien n'était mais se plonge
encore davantage dans ses troubles alimentaires. Mattia et elle
n'expriment jamais leurs sentiments mais l'auteur arrive à exprimer
leur ressenti avec force.
A noter que ce livre a été adapté au cinéma en 2011. Voici la fiche Allociné. Il est d'ores et déjà
disponible en VOD et j'ai hâte de le visionner.
De plus, je tire mon chapeau à Paolo Giordano qui a obtenu avec ce premier roman le très prestigieux Prix Strega... Et il a deux ans de moins que moi (Il est né en
1982). C'est peut être aussi ça qui m'a touchée chez Mattia et Alice : nous avons le même age...
La phrase que je retiendrai : "Les choix se font en l'espace de quelques secondes et se paient le reste du
temps."
Éditions Points - Drame - 342 pages.
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